A ce jour, il y a trois mouvances principales dont l’objectif est d’unir la gauche tunisienne fragmentée. Interprété par les Tunisiens comme une division et non une force, aucune de ces forces ne peut prétendre aujourd’hui pouvoir se dresser, de front, contre ce que certains conviennent d’appeler le Titan nahdhaouis.
Encore plus grave, une de ces mouvances, Nidaâ Tounes, donne des signes d’« ouverture » à Ennahdha tout en s’adressant, sur le plan de l’électorat, aux Tunisiens de gauche, perdus car ne trouvant aucun parti assez solide à soutenir. Quelles sont ces trois mouvances, et dans quelle mesure doit-on redouter ou soutenir « Nidaâ Tounes » ?
D’abord, il y a « Al Massar » qui réunit Ettajdid, le Parti du Travail et le Pôle. Trois figures le dominent: Samir Bettaieb dont les interventions à l’assemblée nationale constituante et à la télévision sont très appréciées; Ahmed Ibrahim, et Abdel Jalil Bedoui, un homme d’excellence. Economiste, il est membre fondateur de l’association des économistes tunisiens et de l’association des économistes maghrébins, et expert auprès de l’UGTT.
L’échec d’Al Massar a été attesté par ses propres fondateurs : Leila Hamrouni et Hatem Chaâbouni, en plus d’une vingtaine de membres du comité central d’Al Massar, ont rejoint l’initiative de Nidaa Tounes. Tarek Chaâbouni, cité par le journal Business News, a expliqué cela en déclarant: «Nous n’allons pas attendre un nouvel échec pour réagir comme il se doit aux risques encourus par notre pays et ses acquis civilisationnels».
Ensuite, « Al Jomhouri », qui rénuit Afek Tounes, le PDP, le parti Républicain, Irada, Bledi, le PJSD et le Parti Al Karama, ainsi que des groupes et des listes indépendantes. Ce dernier se porte mieux qu’Al Massar, surtout depuis que Maya Jribi a pris le relais sur le plan médiatique et Néjib Chebbi s’est mis en retrait. Actuellement, le parti est tellement représenté par des figures telles qu’Iyed Dahmani, Maya Jribi ou encore Issam Chebbi qu’il a fini par être assimilé au PDP soutenu par Afek Tounes, un parti qui évoque pour le peuple une union de capitalistes, et rien de plus. !
Les autres partis ou groupes constituant le Républicain n’ont pas assez de poids pour imposer leur « couleur » au Républicain. Ainsi, à part ceux qui soutiennent le PDP ou Afek, peu voient dans cette mouvance une réelle tentative d’unir les démocrates.
Enfin, « Nidâa Tounes », guidé par Béji Caïd Essebsi, est la dernière alternative proposée sur la scène politique à ceux s’opposent à Ennahdha et à son projet sociétal.
Fort de figures comme Taïeb Baccouche, ex-ministre de l’éducation, il souffre lui aussi d’une campagne médiatique et politique, visant à résumer ce mouvement à une réunion d’Rcdistes voulant s’organiser et revenir en force pour étouffer la Révolution en regagnant les sphères du pouvoir.
Des constituants comme Taher Hmila du CPR, sur la chaîne Tounsia TV, l’ont clairement dit : « Nidâa Tounes représente les forces contre-révolutionnaires ».
Force nous est d’affirmer que même ces trois mouvances n’ont pas pu recueillir tous les partis politiques d’opposition à l’instar du parti communiste des ouvriers tunisiens.
Al Massar donne de grands signes de faiblesses mais persiste et fonce volontairement vers les élections. Al Jomhouri affirme qu’il n’est plus prêt à assimiler d’autres partis ou à s’unir à d’autres entités, ce qui, d’après les initiés, signera l’arrêt de mort de ce « PDP enrichi ! ».
« Nidâa Tounes », quant à lui, fait réellement peur à Ennahdha. Différents homme de ce parti s’en prennent à l’initiative autant qu’a son chef charismatique. Rafik Bouchlaka, ministre des Affaires étrangères, se moquant de l’âge d’Essebsi en est un des exemples les plus révélateurs!.
Pourtant, une autre lecture est possible. Hamma Hammami de plus en plus apprécié pour ses positions prévient les Tunisiens d’une mauvaise surprise : « Nidaâ Tounes » est un parti de droite libérale, qui a été fondé non pour contrer Ennahdha, mais pour lui faire avouer son échec et l’aider, afin de « sauver la Tunisie ». Dans ce sens, une alliance entre Nidaâ Tounes et Ennahdha constituerait le plus grand monstre politique que la Tunisie n’aura jamais connu, ce qui serait une catastrophe politique.
Peu de personnes y pensent, voyant en Nidaâ Tounes une alternative à Ennahdha. Pourtant, la boutade d’Henry Ford pourrait s’appliquer en Tunisie : « Tout le monde a le droit de choisir la couleur de sa voiture, pourvu qu’elle soit noire ».
Pour conclure, il faut être sûr que la farce jouée précédemment par Ettakattol et le CPR, qui ont été portés au pouvoir par des gens contre le parti islamiste pour finalement décevoir beaucoup en s’y alliant, ne se répète pas avec Nidaâ Tounes.
Ainsi, l’on aura réellement les figures Rcdistes connues qu’Ennahdha ne peut ni ingérer ni assumer, unies à elle d’une façon indirecte.
Mohamed Anis Abrougui
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